lundi 11 octobre 2010

Le nouveau programme de formation infirmière

Ce que je pense de ce qui m'arrive, moi, pauvre étudiante infirmière ayant bêtement redoublé sa première année et testant à présent le nouveau programme.


C’est le programme de formation infirmière le plus nul depuis Florence Nightingale. Bon, c’est vrai, c’est un jugement de valeur. Je recommence : ce programme de formation infirmière est, à mon avis, le moins judicieux depuis les débuts de la formation.
Ayant eu la joie de redoubler ma première année (non, je l’admets, c’était nécessaire), je fais partie de l’élite –des étudiants, veux-je dire- qui peut comparer les programmes. Si ça ne tenait qu’à moi, je repasserais bien à celui d’avant 1992 ; mais passons. Voici ce que je pense du nouveau : ce qui, de mon point de vue, devrait être une formation professionnelle est devenue une formation universitaire. Oui, c’est le prix de l’équivalence licence. Mais pas au point de n’être pas compétent, non ?
Je m’explique : je suis en deuxième année, et lorsque je regarde les neuf Unités d’Enseignements du Semestre 3 (ah ça, y a pas à dire, la nomenclature est belle), je n’en vois que quatre d’utiles, qui trouveront une application concrète dans le travail de l’IDE. Et encore, pour l’unité de soins relationnels, je ne pense pas, du haut de ma piètre expérience, que tant de TD aident réellement à pouvoir prendre en charge en entretien un patient psychotique ou dépressif.
En revanche, tout ce qui fait notre futur métier, à savoir la physio-pathologie, la pharmacologie, les soins infirmiers, les points de surveillance, eh bien, on les cherche. Il y a peu de cours, et ils sont pour la plupart assurés par des médecins ou universitaires. C’est intéressant, certes, mais considérons mieux le problème : ayant peu d’heures, ils sont contraints de faire du « dense ». Donc nous devons approfondir nous-mêmes la théorie, histoire de comprendre. Puis nous devons en déduire, toujours par nous-mêmes, le rôle infirmier qui en découle. Je sais que c’est le système fac qui veut ça, mais je me suis laissé dire qu’en fac, les étudiants ont à peu près vingt heures de cours par semaine. Je ne doute pas non plus de l’efficacité pédagogique de cette méthode (nous laisser découvrir le rôle infirmier…), mais ajouté à des semaines de, en moyenne, 38 heures, plus les cours de santé publique, législation et autres gestion des risques à apprendre, ça fait beaucoup. Je me suis aussi laissé dire que si l’on additionne toutes les heures prévues par le programme, TD, CM et TPG, « on n’arrive pas à les caser dans un semestre, à moins de faire du nocturne ».
Comme quand on sera diplômés, quoi ; sauf qu'il faudra aussi travailler le jour ; et travailler ses cours.
C’est pour cela qu’il nous arrive de regretter certaines journées de TD de « soins relationnels » ou de « santé publique »… On est d’accord, cela « donne de la culture générale ». Mais je ne crois pas que nous ayons besoin de culture gé, de psycho sociale ou cognitive, d’épidémiologie, alors que nous devons chercher par nous-mêmes à comprendre le système porte hépatique.
Un professeur a réussi à nous dire l’autre jour –peut-être ai-je mal compris ?- que ce programme « tend à supprimer au maximum les différences entre l’IFSI et les services hospitaliers ». Si je puis me permettre, donc : mdr. Les stages ? Quoi les stages ? Aaah oui. Eh bien parlons-en, des stages. Un simple chiffre : l’ancien programme proposait cinq stages par an. Le nouveau programme : six stages pour toute la formation. Oui, ils sont plus longs. Mais l’intérêt de la formation n’est-il pas d’apprendre à s’adapter ? S’adapter vite ? A des terrains différents les uns des autres ? Puis, en dix semaines de stage, un étudiant n’est plus un étudiant ; pour peu qu’il soit dans un service ayant un problème de sous-effectif, il devient professionnel à part entière. Je ne dis pas que ce n’est pas formateur : je dis que c’est moins formateur que la diversité et l’adaptation rapide à un lieu de stage. Et qu’un statut réel (et reconnu…) d’étudiant, en apprentissage.
Un autre inconvénient de cette réduction du nombre de stages : les différences de niveau entre étudiants d’une même promotion est encore plus flagrante qu’auparavant. Exemple fictif : Saturnine est étudiante infirmière en première année, elle fait son premier stage en hôpital (chirurgie, admettons). Là, « première-année-premier-stage » oblige, elle va suivre les aides-soignantes. Le deuxième stage de Saturnine est alors en maison de retraite ou en crèche. Elle arrivera en deuxième année sans avoir jamais fait de pansement ni de prise de sang. Alors que d’autres, plus chanceux, savent faire sondages urinaires et retrait de redon.
Les MSP… Beaucoup ont crié au miracle lorsqu’elles ont été supprimées. Je dois moi-même mon redoublement à un ratage de MSP ; et pourtant, je l’affirme : c’est formateur. C’était formateur, j’en suis convaincue. Le nouveau système de notation, lui, est plus qu’abscon : les compétences à valider sont joliment exprimées, certes, mais peu adaptées (encore une fois : c’est mon avis et celui de ceux à qui j’en ai parlé) au concret de travail quotidien. Fastidieux à remplir, il complique encore la vie des soignants qui n’ont, honnêtement, pas que ça à faire de déchiffrer de merveilleuses énigmes genre Sphinx de Thèbes pour avoir l’insigne honneur de noter l’étudiant qui est assis de l’autre côté du bureau en cachant son appréhension. Une observation, entendue de la bouche d’une infirmière remplissant le portfolio ; les compétences sont censées être « acquises » au DE, mais qui peut dire avoir vraiment « acquis » un soin et savoir le faire parfaitement ? Après tout, tout le monde, les diplômés comme les étudiants, à toujours quelque chose « à améliorer ». Ou alors il y a un problème d’auto-évaluation surestimation ?
Au risque de faire bondir de nombreuses personnes, je m’en doute, j’aurais préféré ne pas avoir de reconnaissance de licence d’équivalent licence, et garder une formation professionnelle, car je ne sais pas vous, mais moi, je suis entrée en IFSI pour être infirmière, et compétente…

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